LA MEDECINE

 

 

 

          Médecin forçat !

  Au 36 rue d'Alsace, à Clichy, les consultations ont lieu tous les jours de 13h30 à 15 heures, les mardis et vendredis de 21 heures à 22 heures, ce qui laisse au docteur Destouches du temps pour se rendre à Paris, fréquenter des laboratoires ou pour écrire.
 " Chimiste le matin " dira Mahé en évoquant son ami. De bonne heure, le docteur Destouches se rend certains matins à l'Institut
prophylactique, 36 rue d'Assas, fondé en 1916 grâce à la générosité du millionnaire américain Frank Jay Gould, et dirigé par le docteur Arthur Vernes, pour lutter contre les maladies vénériennes. Arthur Vernes (1879-1976) publiera en 1935 S.O.S. pour la défense de la race, préfacé par Alexis Carrel.
 Le docteur Destouches travaille également le matin au 38 boulevard Montparnasse, Paris XVe, à la rédaction de publicités pharmaceutiques pour le laboratoire de Romuald Gallier, un pharmacien, un ancien de 14, membre du conseil d'administration de la Biothérapie, qui a mis au point l'Arthémapectine Gallier, contre les hémorragies, et la Kidoline, contre le coryza aigu du nourrisson. Victor Vasarely réalisait pour lui des dessins publicitaires.

 A la fin de l'année (1928), Louis Destouches entre au service de la Biothérapie, 140 bis rue Lecourbe, laboratoires spécialisés dans les vaccins et la pâte dentifrice. Il y restera jusqu'à la publication de Bagatelles pour un massacre, mais dès avril 1933, son activité y sera réduite. La Biothérapie est dirigée par deux Israélites, Charles Weisbrem et Abraham Alpérine, qui se connaissaient depuis la Russie et la révolution. Pour  1000 francs par mois, le docteur Destouches est employé comme médecin de l'entreprise, mais surtout comme rédacteur médical. Il s'occupe de la publicité du dentifrice Sanogyl et les vaccins du " chercheur maison ", Alexandre Besredka.

 Sans doute Louis et Elizabeth accueillirent-ils après les fêtes de Noël la petite Colette, âgée maintenant de 8 ans. Le 1er janvier 1929, Louis Destouches entrera au dispensaire municipal de Clichy, lors de son inauguration, pour une vacation quotidienne de 17 heures à 18h30, au 10 rue Fanny. La direction en avait été confiée en septembre au docteur Grégoire Ichok. Louis Destouches entamait un nouvel épisode de sa vie romanesque dans la médecine sociale d'un dispensaire de banlieue communiste.
 (Céline en son temps, Spécial Céline n° 14, Eric Mazet, automne 2014, p. 34).